24 mars 2009

Le Twiller met la littérature au web 2.0

un article de www.lesoir.be

Le réseau social Twitter permet de raconter sa vie en temps réel via des mini-messages de 140 caractères. Depuis peu, auteurs et anonymes s'emparent de ce mode d'expression pour écrire de véritables romans. Thierry Crouzet est l'un d'entre eux.
Le Twiller met la littérature au web 2.0

Twiller. Non, ce n'est pas un remix inédit au menu du prochain album du roi de la pop. C'est un roman interactif écrit via le réseau communautaire Twitter. Avec « Croisade », l'écrivain français Thierry Crouzet est sans doute le premier, depuis décembre dernier, à importer ce nouveau mode d'écriture « made in USA ». On doit cette tendance et son appellation – contraction des mots thriller et Twitter – à Matt Richtel, un écrivain et journaliste au New York Times, qui a tenté l'expérience en juin 2008. Le principe : l'auteur écrit son roman quotidiennement par mini-message. Sa seule contrainte : ne pas dépasser 140 caractères, comme c'est la règle sur Twitter.

« Moi, j'ai commencé le 25 décembre dernier », explique Thierry Crouzet. « J'avais préparé le début d'un livre au début du mois et après réflexion, je me suis dit que ça pouvait faire un excellent début de thriller. La publication au jour le jour crée un suspens et une attente. C'était parti. »

La tendance fait des émules, on peut citer d'autres fictions terminées ou en cours comme « Tous les tombeaux se ressemblent « de Laurent Zavack ou « Buboneka », de deux auteurs, LeRoy K. May et Eric Bourdonnais. On voit même apparaître de la poésie, c'est dire si le phénomène prend de l'ampleur.

Les lecteurs orientent l'intrigue

Comme dans les « keitai shosetsu « japonais (romans écrits sur GSM), les lecteurs peuvent intervenir et échanger avec les auteurs. Thierry Crouzet souligne : « C'est une vraie source d'inspiration, je ne me sens pas seul quand j'écris Croisades. Les lecteurs pensent souvent à des choses que je n'avais même pas imaginées. Au final, l'histoire est écrite autant par moi que par mes followers (les internautes qui suivent un profil twitter NDLR) ».

Chaque jour, le romancier poste plusieurs twitts (mini-messages) et fait avancer son histoire. « J'ai toujours une dizaine ou une quinzaine de twitts d'avance afin d'avoir une trame plus ou moins élaborée », note le romancier. « Mais de toute façon, ils ne restent presque jamais tels quels ».

Pour Thierry Crouzet, l'écriture avec une contrainte permet la créativité, elle est à rapprocher des modes d'écriture des membres de l'Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle), des Perec et autres Queneau. L'écrivain confie tout de même utiliser certaines astuces : « J'écris en français, je ne pratique pas l'écriture télégraphique ou de type SMS, c'est toute la difficulté. Il m'arrive de faire volontairement une faute d'accord ou d'espace afin de gagner quelques caractères indispensables à un mot ».

A l'allure actuelle, Thierry Crouzet publie une à deux pages de roman par jour. S'il garde le rythme, il entend terminer ce premier Twiller en fin d'année. A suivre donc…

Jérémy Chauche (St)